Comment négocie-t-on le prix des médicaments en 2016
En ce début de l’année 2016, un nouvel accord cadre a été signé entre le CEPS (Comité Economique des Produits de Santé) et le LEEM (Les entreprises du médicament) constituant le cadre de référence de la régulation conventionnelle du médicament jusqu’au 31 décembre 2018.
En deux mots
En résumé, les industriels du médicament et les pouvoirs publics se sont entendus pour avancer sur le renforcement de l’analyse médico-économique, sur la garantie que la prise en charge des médicaments intervienne dans le respect de leurs indications, sur un accès plus rapide des nouveaux médicaments au marché, sur une accélération de la pénétration des biosimilaires et sur une prise en compte des investissements en recherche et développement des entreprises en Europe dans la politique de fixation des prix. Il est à souligner que des efforts ont été réalisés sur la rapidité de mise sur le marché pour les produits innovants apportant au patient un bénéfice, et les antibiotiques basés sur une nouvelle substance active. Ces produits vont pouvoir bénéficier d’une procédure de fixation du prix accélérée. Le CEPS s’engage à proposer à l’entreprise un projet de convention valable cinq ans, dans les 75 jours suivant l’avis de la commission de la transparence, afin que le délai de 180 jours entre l’obtention de l’AMM européenne et la communication du prix soit respecté. Pour rappel, on est actuellement à 300 jours en France contre quelques semaines en Allemagne. Un Focus sur les contrats de performance Dans le précédent accord, les industriels du médicament avaient déjà la possibilité de passer par des contrats de performance afin de trouver un terrain d’entente dans les cas de négociation plus ou moins bloquée. Dès lors, il pouvait être question de nouer des contrats du type « satisfait ou remboursé », souvent nommés ainsi dans la presse. Autrement dit, il s’agissait d’une « petite révolution » dans l’industrie pharmaceutique française avec une possibilité donnée au payeur de se voir remboursé en cas d’échec du traitement. Sur le papier, la formule attire. Pourtant, peu d’exemples concrets de ce type sont référencés en France sur cette période. Finalement en allant frapper à la porte des spécialistes de l’accès au marché, le « satisfait ou remboursé » se révèlait attrayant en théorie, mais complexe à mettre en place concrètement pour les industriels. Un « terrain miné et glissant » pour beaucoup : projets trop longs à mettre en place, trop couteux pour les industriels, et surtout potentiellement risqués pour le laboratoire.
Et aujourd’hui ?
En 2016, l’accord-cadre nous précise que le Comité définira les indicateurs qui permettront d’évaluer la performance en vie réelle, les modalités et le terme de réalisation de cette évaluation. L’accord prévoit que l’évaluation de la performance pourra se faire sur la base d’une étude observationnelle ou sur le suivi d’indicateurs en provenance de registres, de données de marché et de bases de données médico-administratives. Dans le cas d’un désaccord, le comité auditionnera les membres du comité scientifique de l’étude ayant permis l’évaluation de la performance. La nouveauté contenue dans cet accord est la création d’un comité de Suivi des Etudes en Vie Réelle (CSEVR). Le CSEVR réunit le CEPS et la HAS et a pour mission de faciliter la réalisation des études en vie réelle depuis leur initiation jusqu’à l’analyse finale des résultats. En outre, le Comité s’attachera à promouvoir une coordination de tous les instants avec la HAS de sorte que la demande d’étude adressée à l’industriel soit unique, dans le but d’éviter les redondances et ainsi de favoriser la réalisation de l’étude, ce qui est fort apprécié des industriels qui garderont la main sur leur façon d’opérer ces contrats. Le comité et la HAS devront prioriser les objectifs des études, en maîtriser le nombre et également fixer des délais réalistes. Ceci va dans le bons sens car aujourd’hui, peu de laboratoires avaient les moyens financiers et logistiques pour mener ce genre d’études.
Il est également prévu qu’un comité scientifique soit mis en place. Ce dernier définira quel type d’étude il conviendra de choisir pour évaluer la performance. Evidemment, la commission de la transparence pourra émettre des objections quant au degré d’indépendance des membres pressentis à ce conseil scientifique.
Dans le cas d’un surcoût disproportionné pour une étude donnée, l’accord prévoit la mise en place de compensations par des réductions de remises conventionnelles. Pour terminer, les résultats seront remis au CEPS et à la HAS qui évalueront les résultats et fixeront le comité le degré d’atteinte des objectifs et in-fine, cela pourra conduire à une modification de l’avis de la commission de transparence. Selon nous, ces nouvelles dispositions ont le mérite de mieux fixer les règles du jeu. Certes le CSEVR ainsi créé, devrait permettre d’aplanir certaines questions techniques mais la véritable question est de savoir si les accords de ce type vont se développer dans l’avenir, de façon plus significative en France. Il faut rappeler que des dispositifs à peu près identiques sont développés en grand nombre depuis déjà de nombreuses années sur d’autres marchés (US et Italie notamment). Il existe donc à ce jour une sorte d’exception Française sur le sujet.
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